Derrière la façade Les personnages de Philippe Djian n'ont d'autre souci que de tromper l'ennui. Jusqu'au drame Maintenant qu'il a dépassé la cinquantaine, publié
un tas de bouquins, résisté à toutes les critiques, Philippe Djian est
assez connu pour écrire comme il l'entend. Ce n'est pas Proust, on le
sait. Faut-il pour autant le jeter aux orties? Sûrement pas. Il a le mérite
d'irriter les défenseurs d'une langue tellement belle qu'on ne la parle
plus que dans le Lagarde et Michard. Avec sa prose saturée de sons,
d'images, de paroles et de personnages, il dit le monde tel qu'il est
aujourd'hui, ordinaire, complexe, souvent confus. Lui qui n'est ni
phraseur ni faiseur l'affronte avec sincérité, jusque dans ses
maladresses. Il questionne, et s'empare d'un sujet vieux comme le monde,
les conflits de générations. Ça s'appelle Impuretés et se déroule
en un lieu clos. Comme d'habitude. On y voit des privilégiés friqués,
indifférents à tout sauf à eux, vivre en un lieu protégé où leurs
enfants grandissent à l'abri du monde, de ses dangers, mais pas de
l'ennui. Ils se distraient de came, de sexe. Jusqu'au drame: après une
nuit de fête, Lisa se noie. © Daniel Martin, L'Express, 28/02/05 |