Les écrivains évoqués dans Ardoise (2)
Henry Miller - William Faulkner - Ernest Hemingway - Richard Brautigan - Raymond Carver

 

 

Henry Miller

 


Sur La crucifixion en rose

"Je ne me suis pas décidé à devenir un écrivain du jour au lendemain, mais Henry Miller a sans doute représenté un point de non-retour." (p. 75)

"Littéralement parlant, Henry Miller est une force de la nature, comme le sont les écrivains portés par le souffle et qui tiennent la distance. Il y a un aspect purement physique dans leur travail, qui les rapproche davantage des sculpteurs que des peintres." (p. 77-78)

"Personne, mieux que Henry Miller, n'est parvenu à démontrer que la pornographie est une arme absolue, la chair la plus près de l'os, l'infime part de pure vérité que nous soyons capable d'exprimer à propos de nous-mêmes." (p. 79)

"Avant que ma femme n'arrache les portraits d'écrivains que j'avais épinglés au mur [...], Henry Miller figurait en bonne place." (p. 84)

 

 

William Faulkner

 


Sur Tandis que j'agonise

"Faulkner agit sur le lecteur par envoûtement. Ce qui signifie que celui-ci atteint très vite une sorte d'état second, somnambulique, à mesure qu'il s'enfonce au cœur du roman, cerné de toutes parts, emporté par des bras qui le saisissent les uns après les autres et le soulèvent." (p. 88)

"Faulkner est un auteur magnifique, indispensable, vertigineux, d'une incroyable richesse. Tandis que j'agonise est une pure merveille, Le Bruit et la Fureur une espèce de diamant et Lumière d'août un bloc d'or incandescent. Voilà ce qu'il faut dire." (p. 89)

"Je dois à Faulkner des vertiges qu'aucune drogue n'a jamais déclenchés dans mon esprit." (p. 94)

 

 

Ernest Hemingway

 


"À présent que j'aborde Hemingway, rien ne va plus. Je ne sais plus par quoi j'ai commencé. Ni quel ouvrage m'a marqué davantage que les autres. Sans doute les nouvelles, mais je ne le jurerais pas. Peut-être Le vieil homme et la mer pour la beauté de l'écriture. À moins que ce ne soit Le soleil se lève aussi." (p. 97)

"On doit admettre que s'il en rajoutait, Hemingway payait tout de même de sa personne. Son corps attirait les ennuis, expérimentait le monde par un contact quasi permanent. La douleur en manière d'exercice de style." (p. 100)

"Comme beaucoup d'écrivains, j'ai passé de longues heures à étudier ce style à la loupe, essayant de comprendre comment l'on arrivait à une telle acuité, à une telle concision, en évitant le moindre ornement. Comment, pour reprendre une indication de Hemingway, on décrivait un iceberg tout entier en n'en montrant que la pointe émergée." (p. 102)

 

 

Richard Brautigan

 


Sur Tokyo-Montana Express

"Richard Brautigan peut faire tenir une tragédie grecque dans un dé à coudre. Ou trouver un cheveu de femme dans une meule de foin. Combien en sont capables ?" (p. 109)

"Comme tous les grands désespérés, Brautigan est capable de la plus irrésistible drôlerie, des plus purs élans d'optimisme. Il est l'homme de la tempête de neige à deux flocons, l'homme d'une lueur dans la boutique d'un marchand de glace, en plein cœur de l'hiver, l'homme qui transforme les restaurants vides en entreprises de pompes funèbres." (p. 110-111)

"Bien entendu, à lui seul, Richard Brautigan n'est pas toute la sève qui a de nouveau jailli dans les branches. Mais combien sont-ils à explorer le sol de leur salle de bains pour retrouver un cheveu de leur amoureuse et en faire tout un roman ?" (p. 115)

 

 

Raymond Carver

 


"Raymond Carver écrit comme un dieu et toute espèce de discussion à ce propos n'attire que les crétins de la pire espèce et les besogneux." (p. 121)

"Ma fille, le jour où Raymond Carver aura droit aux mêmes honneurs que Nabokov, tu verras ton père se retourner dans sa tombe." (p. 123)

"Raymond Carver avait tellement de choses à dire et il s'accordait si peu de mots pour les exprimer. On dirait de l'ivoire. Pour bien comprendre, il faut être en colère, ou profondément amoureux ou malheureux, enfin excité ou électrisé d'une manière ou d'une autre." (p. 125)

"En tout cas, j'aurais terminé cet exercice avant qu'il puisse m'arriver quoi que ce soit, et donc, il n'y aura plus rien après Raymond Carver.
Je ne dis pas rien au-dessus, je dis rien après." (p. 127)